mardi 14 février 2012

Mangez le si vous voulez – Jean Teulé


C’est la crise les mecs. La vraie, la dure, ils arrêtent pas de nous rabattre les oreilles avec ça, jusqu’au dégoût presque. Rien que voir ou entendre ce bon dieu de mot me fait instantanément vomir dans ma bouche. Alors je vous le concède j’ai l’estomac taquin, et vomir n’est pas un problème pour moi. J’ai jamais psychoté là dessus comme bon nombre de mes amis. J’arrive même à me faire régurgiter sans rien faire, je vous l’avais déjà dit, j’suis un peu chochote sur certains points. Mais bon là n’est pas le propos. Perso la crise, je trouve que c’est surtout un bon prétexte pour nous la mettre bien à l’envers, comme savent si bien le faire nos politiques. Et là y a pas de bord qui tienne, de droite comme de gauche, quand il s’agit de sodomiser jusqu’à la garde la population qu’ils régentent, ils s’entendent plutôt bien. Qu’on se le dise, Pepsi Kola fait de ce lieu un espace politique aussi. Et comme l’a passablement gloussé Napoléon Sarkozy dans son intervention de dimanche en 15, « Il faut arrêter que n’importe qui dise n’importe quoi n’importe comment ». Amen !!! Il faut bien lui accorder que dire « n’importe quoi n’importe comment » doit se faire en respectant une certaine logique, des règles établies, ce qu’ils se tuent à faire, lui et son équipe. 

Entre Chantal Brunel, député UMP, qui souhaite « rassurer les français sur toutes les migrations de populations qui viendraient de la Méditerranée. Après tout, remettons-les dans les bateaux ! » (à mais voilà une solution efficace, pourquoi pas les jeter par-dessus bord en leur coulant préalablement les pieds dans le béton, ça règlerait le problème) et Xavier Darcos, ministre de l'éducation, qui dévoile son idée la « plus novatrice tu meurs » pour réduire les coûts salariaux en Maternelles, en arrêtant de faire « passer des concours bac+5 à des personnes dont la fonction va être essentiellement de faire faire des siestes à des enfants ou de leur changer les couches » (c’est vrai que leur rôle éducatif est vraiment mineur, c’est bien connu entre 3 et 6 ans, on est de profond demeurés n’ayant besoin de rien d’autres qu’un mouchoir pour conserver son sable doux) ou encore, et là c’est une de mes préférées, Nora Berra, secrétaire d’Etat à la santé, qui conseille aux « personnes les plus vulnérables », dont les « sans-abri », « d’éviter de sortir [...] en cas de grand froid ». Celle là est vraiment magnifique vous en conviendrez, c’est vrai quoi, au moins qu’ils n’oublient pas de mettre leur manteau Gucci en laine d’alpaga. On croit rêver, mais on est obligé d’avouer que quand il s’agit de dire n’importe quoi n’importe comment, la majorité présidentielle sait y faire.

Roulements de tambour messieurs dames, voici ma phrase d'accroche : et on est pas à l’abris qu’un de ses 4, l’actuel gouvernement nous conseille le cannibalisme pour lutter contre la faim. Quelle meilleure introduction (là vous pouvez pas le voir mais vraiment je jubile grave) que le cannibalisme pour vous parler du bouquin d’aujourd’hui. A quand tu me vois comme ça, on dirait pas, mais j’ai lu « Mangez le si vous voulez » de Jean Teulé. La brioche fourrée :

« Comme ces canards à la tête tranchée, il court encore ! ». Alain de Moneys, jeune bourgeois aimé de tous et tout juste élu à l'unanimité conseiller municipal du village voisin de Beaussac, n'est pas encore au bout de son chemin de croix dans les ruelles de Hautefaye en cet après-midi du 16 août 1870. Sa pendaison ? Ratée. Les branches du cerisier n'étaient pas assez solides. Sa crucifixion chez le  maréchal-ferrant ? Ecourtée, par l'appel d'une tournée générale, malgré des phalanges de doigts de pied coupées à la tenaille. Son écartèlement dans la halle aux grains ? Manqué, même si ça l’a laissé salement amoché. Le bûcher aura finalement raison de celui qui s'apprêtait à partir à la guerre mais qu'un incroyable quiproquo transforme en «Prussien» face à une foule déchaînée. Au point de finir sur des tartines badigeonnées avec sa propre graisse !!! Et c’est tiré d’un fait divers de l’époque romancé par Jean Teulé, qui est connu pour sa plume intelligente à l’humour noir ravageur. Plus de 600 personnes impliquées seulement une vingtaine condamnées, dont 4 à mort par la guillotine, sur la place du village, mais c’est toute une communauté qui s’est donné la main pour lui fracasser la tronche à grand renfort de rondins et autres fourches, alors même que bon nombre d’entre eux profitaient allègrement des largesses du jeune notable.

Voilà un bouquin dérangeant. Incroyable de cruauté, arriver au bout est une véritable épreuve de force, enfin pour être précis, il faut le cœur drôlement bien accroché, mais ça se lit à toute vitesse, au rythme des différents lieux de l’horreur. Ca fait bien réfléchir sur ce à quoi l’être humain est capable (si l’histoire du monde ne vous suffisait pas entre l’esclavage, la colonisation, le IIIe Reich, les divers génocides …), et où peut entraîner l’hystérie collective. Âmes sensibles s’abstenir, vraiment, les faits relatés y sont abominables, et le livre est pas mal troublant, car à tous les bien pensants qui en tant de guerre auraient forcément été résistants, et bien non, ça n’arrive pas qu’aux autres comme les accidents de voiture ou la paternité. N’est pas Guy Môquet qui veut.


3 commentaires:

  1. J'vais encore la ramener mais j'avais lu Le magasin des suicides du dit mentionné ci-dessus-ci-dessous, et j'avais pas du tout aimé, j'avais trouvé sa plume très "froide", certes c'était humoristique mais j'avais pas rigolé.
    Celui-ci ne me tente pas trop du coup (pis bon, y'a un moment faut faire un choix, quand la pile d'attente s'agrandit).

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  2. Ben c'est pas le chef d'oeuvre du siècle mais ça se lit bien (autant que c'est possible avec un sujet pareil). Ca fait genre 130 pages, j'ai du mettre moins de 24h à le lire. Mais c'est sur que des choix s'imposent par moment, on peut pas être partout ma bonne dame !!!

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  3. Perso j'ai bien kiffé Les lois de la gravité de ce Jean Teulé, un bon petit huis-clos d'une nuit en 130 pages qui se lit vraiment très bien, et Le Montespan, l'histoire du mec qui s'est fait piqué sa femme par Louis 14 et qui à tout fait pour la récupérer.Pour Le magasin des suicides ça fait très pince sans rire, et pas évident de rentrer dedans, mais ça se lit bien aussi j'ai trouvé. Par contre ça m'a donner envie de lire celui là, qui a l'air plus trash, et...car Teulé à l'air de faire un nouveau livre bien différent à chaque fois donc tout le monde peut y trouver son compte.

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